Je reprends pour qualifier ces deux villes le mot « folles », emprunté aux années de l’après première guerre mondiale en France où l’on faisait la fête et l’on se plongeait dans la modernité ; les fameuses « années folles ».
Je pense qu’Hong-Kong et Singapour n’ont rien à voir avec la plupart des autres villes du monde, aussi bien dans leur aspect, leur population, leur mode gouvernance ou leur taille, et ça les rend particulièrement intéressantes.
Dans les deux cas, la démocratie est à peu près absente : à Hong-Kong, du moins depuis que le territoire a été rétrocédé à la Chine, l’élection du gouverneur se fait par un corps électoral de 12000 personnes composé des familles les plus riches, les Tycoons. Quant à Singapour, le même parti est continuellement élu (très démocratiquement, on vous jure) depuis 1959… Et dans les deux cas, les opposants politiques se présentant aux élections ont parfois des coups de malchance les empêchant de participer au dernier moment.
Mais le système semi-dictatorial couplé à la petitesse du territoire fait de ces deux villes d’intéressants laboratoire de la modernité, aussi bien pour les mesures environnementales que pour le développement urbain ou financier. Et tant que ces deux « pays » sont « bien gérés », l’absence de démocratie reste toléré par les populations (quoi que la célébration des 15 ans du retour de Hong-Kong dans le giron Chinois ait donné lieu à quelques remous).
Pour vous donner un peu la mesure de la « folie » des deux villes, voici quelques points : à Hong-Kong, la distance entre l’île principale et Kowloon se réduit tellement (à force de gagner du territoire sur la mer) que les courants qui passent dans ce détroit s’accélèrent. Autre chose impressionnante, malgré ses impôts faibles (par rapport à la France), Hong-Kong est parfois en excédent budgétaire, et est allé jusqu’à rendre des sous à ses contribuables l’an passé !
Les deux villes sont également connues pour leur rigorisme quant à l’hygiène : des actes tels que jeter un mégot, cracher par terre ou nourrir les pigeons sont punis d’amendes allant de 150 à 500 euros. On trouve des robinets à déclenchement automatique jusque dans les toilettes de plage, et à Honk-Kong, faire tourner le moteur de sa voiture lorsqu’elle est stationnée (climatisation) est maintenant puni.
Singapour quant à elle est très impressionnante par son côté démentiellement futuriste. Le quartier du centre financier n’existait pas il y a trois ans… c’était la mer ! Aujourd’hui c’est une enfilade de tours et de centres commerciaux. En fait, les centres commerciaux sont le vrai nerf de la ville : on peut passer d’une tour à l’autre, et même marcher plusieurs kilomètres sans refaire surface, en passant d’un centre souterrain à un autre. Très pratique en cas de pluie… mais aussi assez effrayant lorsqu’on ne se rappelle plus si on est encore sous terre ou pas, perdu entre les néons lumineux.
De son côté, Honk-Kong comporte un grand nombre de passerelles et de voies aménagées pour les piétons (et couvertes) permettant de passer d’une tour à l’autre à l’abri des intempéries.
Face aux problèmes de pauvreté, Singapour et Hong-Kong ont mis en place des solutions de logement : la première favorise la propriété (95% des gens sont propriétaires de leur logement, c’est le plus haut taux du monde). Singapour c’est de plus occupé de créer un système de retraites privé mais obligatoire (cotisation de 15% par le salarié et 20% par l’employeur). Hong-Kong offre à ses pauvres un immense parc HLM. Bref, sans dire que la pauvreté a été éradiqué, le capitalisme dictatorial se teinte de social…
Ces deux villes sont donc l’occasion d’un bouillonnement d’idées et d’expérimentations qui ne pourraient pas voir le jour ailleurs. Du coup, au lieu d’être repoussé par leurs gratte-ciels, on se prend à y apprécier le confort de vie, la possibilité d’avoir la nature tout à côté de la ville, d’avoir la climatisation partout dans un climat torride… Il fait bon vivre à Hong-Kong comme à Singapour…
… mais est-ce qu’on veut vraiment que l’avenir ressemble à ça ?
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